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Le Loisir : Un as dans le grand jeu de la vie !
5 Avril 2007

Par Pierre Tardif

 

 

Le loisir, c'est du temps libre… librement utilisé

 

Le loisir est un concept à la mode. Les médias véhiculent des rêves de bonheur tout faits distillés par la société de consommation et projetés sur les ondes comme des ballons distendus dans le vent. « Donne-moi ton temps libre, laisse-moi le modeler à ton goût », semble-t-on nous dire… Mais si une publicité donnée paraît s'adresser personnellement à chacun de nous lorsqu'on la regarde, n'est-ce pas, paradoxalement, parce qu'elle a été créée pour le plus grand nombre ?

 

Mais le vrai loisir, lui, est libre, sans contrainte, il est d'abord l'écho de nos voix intérieures. Sachant cela, il nous reste alors à tendre l'oreille. Selon le professeur André Thibault[1], « il faut bien comprendre que le moteur premier du loisir, c'est la personne. Il faut l'accompagner dans ce qu'elle veut faire. Le loisir, le vrai, se définit d'abord par son degré de liberté ». On cherchera donc en vain un catalogue de loisirs qui nous en donnerait une liste complète et exhaustive. On parle plutôt, de plus en plus, du loisir au singulier, pour décrire l'expérience de loisir: il y a le loisir sportif ou culturel ou de plein air, etc.

 

 

C'est le territoire de notre espace vital et le temps rythmé par notre cœur

 

Pour les retraités, André Thibault a cette belle formule : « Le loisir, c'est la vie qui continue, la qualité de vie, quand on est âgé, étant largement la poursuite de ce que l'on a été avant. Quand j'étais jeune, il n'y avait pas de cinéma maison. Mais le cinéma maison va exister quand j'irai vivre dans une résidence. Présentement, il y a chez moi plus d'équipement pour les loisirs qu'il y en avait dans la salle paroissiale quand j'étais jeune. Les résidences devront donc être le reflet des futures personnes âgées. »

 

Il poursuit : « Ce que je déplore souvent dans les institutions au Québec, c'est que le loisir est strictement occupationnel; ça n'a pas bougé depuis à peu près quarante ans. Et pourtant tout cela sera complètement rejeté par les personnes âgées de demain !» Bien sûr, les personnes âgées ont parfois des réticences à pratiquer certains loisirs, les principaux blocages étant reliés aux moyens financiers, à l'accessibilité et aux problèmes de santé dont il faut tenir compte dans la planification des loisirs[2]. Quant au manque de confiance, André Thibault fait remarquer que la personne qui n'a pas peur peut stimuler celle qui est craintive. Il y a souvent un effet d'émulation très positif. La vie est contagieuse, et elle se transmet tellement bien par le jeu ! Le loisir est donc synonyme d'épanouissement à tout âge.

 

Par ailleurs, le bénévolat peut être une avenue intéressante. Bien sûr, déplore André Thibault, il est trop souvent considéré comme du cheap labour. Les bénévoles ont pourtant des exigences, ils veulent avoir du plaisir, se sentir utiles, réussir quelque chose… D'ailleurs, la défi est présentement de trouver le moyen d'intéresser les baby boomers bientôt à la retraite[3].

 

 

Le loisir est un partage avec les autres

 

Dans ces conditions, pourquoi certaines personnes âgées vivant en résidence ne deviendraient-elles pas des bénévoles si elles le désirent ? Car « le jour où les gens âgés ne sont que des clients, ils n'ont plus d'occasions de se valoriser, de jouer un rôle. Et il n'y a rien de pire que la perte de valorisation ! » Bien plus, « le jour où les gens deviennent des clients parce qu'ils payent, on oublie trop souvent qu'il ne sont pas uniquement cela, qu'ils sont aussi des citoyens, et le citoyen c'est celui qui vit la cité. »

 

Or c'est en tant que citoyens, souligne André Thibault, que s'affirment les droits des personnes âgées qui habitent en résidence. Il rêve d'une résidence qui ressemblerait à un village avec sa place publique qui serait le lieu de rencontre. N'est-ce pas d'ailleurs ce que l'on voit lorsque des personnes âgées se rencontrent dans un centre commercial ? Voilà la citoyenneté qui perdure au-delà des âges et qui se fraie un chemin à travers les lieux qui leur sont accessibles : une place publique, un restaurant… Autant d'endroits pour exercer sa citoyenneté. Ainsi, le citoyen use de son esprit critique et prend sa place au sein de la cité qui l'a vu naître… Il revendique sa part de liberté pour être pleinement lui-même.

 

 

Le loisir est un ensemble de rituels qui nous font grandir

 

« Dans les recherches, on s'est rendu compte que ce n'est pas ce que l'on fait qui compte, mais bien la façon dont on le fait. Par exemple, je peux jouer aux cartes simplement parce qu'il manque un joueur », souligne André Thibault.

 

Pour illustrer ses propos, André Thibault donne l'exemple tout simple des « party de bureau » : si, au quotidien, des différents peuvent opposer les employés, ils tentent néanmoins de faire de cet événement un moment agréable, un moment hors du temps, dans un espace aménagé à cette fin. Cette rencontre semble soustraite à la vie quotidienne et à ses pièges, comme une montgolfière qui flotte au-dessus de la terre ferme, survolant un moment les obstacles de la route.

 

André Thibault note avec intérêt à quel point les personnes âgées n'ont pas toujours « l'air vieux », qu'elles sont tantôt enjouées et pleines de vie, alors qu'à d'autres moments, c'est tout le contraire. C'est que les gens jouent souvent le jeu du vieillissement (comme, du reste, tout autre « rôle » que l'on joue dans la société), et les loisirs, qui ont leur rites propres, font plutôt ressortir la vraie nature de l'être humain : âgé peut-être, mais surtout bien vivant !

 

 

En somme, le loisir est une bouffé de santé !

 

Malheureusement, pour André Thibault, nous avons un ministère de la maladie et non… de la santé ! C'est-à-dire que « lorsque je suis hospitalisé pour une opération au foie, je deviens un foie pour tous les intervenants. Et pourtant, je ne suis pas que cela ! » Or il déplore cette tendance qu'ont de nombreux intervenants en loisirs à se voir un peu comme des intervenants de la santé : « Ce ne sont surtout pas des thérapeutes ! Ça m'inquiète de les voir agir ainsi, car ils mettent uniquement l'accent sur ce qui ne va pas, ce qui n'est pas leur mandat ». C'est pourquoi il a cette phrase-choc : « Notre spécialité, ce n'est pas la qualité de mort, c'est la qualité de vie ! »

 

Vivre le loisir, c'est donc vivre la santé, proclame André Thibault. Il souligne d'ailleurs, pour appuyer ses propos, que dans la politique officielle, le loisir est considéré comme un déterminant de la santé : « Cela veut dire que sur le plan de la prévention, les gens qui pratiquent des loisirs agréables risquent moins d'être malades, et qu'en aval, des gens qui ont des loisirs agréables consomment moins de pilules… »

 

Il faut donc faire du plaisir l'épice de notre existence et en saupoudrer notre vie allègrement, sans crainte… car c'est bon pour la santé !

 


[1] M. Thibault enseigne au département des sciences du loisir et de la communication sociale de l'Université du Québec à Trois-Rivières. Il est de plus directeur de la revue Loisirs et Société et de l'Observatoire québécois du loisir. Nous le remercions pour l'entrevue qu'il nous a accordée. L'adresse de l'Observatoire est https://oraprdnt.uqtr.uquebec.ca/Gsc/OQL/banniere_haut.jpg.

[2] Voir le bulletin de PAUQUAY, Florence, « Tour d'horizon des contraintes perçues et réelles des personnes âgées », vol. 2, no 9 (janvier 2005), disponible sur le site de l'Observatoire.

[3] Voir le bulletin de LAPOINTE, Marie-Claude, « Nouvelles stratégies pour favoriser la participation bénévole des baby boomers » vol. 2, no 3 (octobre 2004), disponible sur le site de l'Observatoire.

 

Pierre Tardif

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