La semaine dernière, le journal La Presse a fait paraître une série d'articles intitulée : « Série boomer : vieillir cool ». Parmi ces articles, il y en a deux qui ont attiré notre attention car ils permettent, lorsque mis côte à côte, de rapprocher les Baby Boomers québécois de ceux du Japon. Bien sûr, au delà de la mondialisation unificatrice, nous voici en face de deux cultures différenciées, et en ce sens, les rapprochements faciles sont toujours dangereux. Mais il y a des ressemblances intéressantes, comme quoi les Baby Boomers d'ici n'ont pas inventé la roue, la roue de l'évolution semblant rouler pour tout le monde…

En effet, dans les deux cas, la génération des personnes qui ont environ 60 ans semble trancher avec la génération précédente. Les boomers japonais font partie de « (…) cette génération qui a accepté et adapté les idées et les technologies qui ont contribué au succès du Japon sur le marché mondial »[1] Tandis que ceux du Québec manifestent non seulement de l'intérêt à « (…) l'avancement de la science, mais aussi de l'ouverture d'esprit et du dynamisme de ceux qui repoussent sans cesse l'échéance de la vieillesse »[2]. Il en résulte une vision toute particulière du vieillissement, fondée plutôt sur le refus de vieillir ou à tout le moins sur le désir de freiner le processus au maximum, tant sur le plan spirituel que physique.

Nos boomers québécois accordent beaucoup d'importance à leur santé. Et pour la maintenir vigoureuse, ils disposent d'un arsenal de produits et de stratégies : naturopathie, vitamines de toutes sortes, yoga etc. autant d'alternatives qui n'étaient pas le lot de la génération précédente. L'article de Nathalie Collard montre pour sa part des Japonais de 60 ans qui refusent de vieillir, évitant du mieux qu'ils peuvent les marques du temps. Ainsi, tant au Québec qu'au Japon, les boomers représentent une clientèle de choix pour un grand nombre de produits plus ou moins spécialement conçus pour eux.

Cet article montre par ailleurs des Japonais, surtout des hommes, qui suivent des cours de piano, de peinture ou de cuisine, alors que les épouses recherchent plutôt des loisirs en dehors de la maison... Pour les Québécois, le rejet de la religion les a fragilisés en les laissant pour ainsi dire à eux-mêmes, d'où le recours à la psychologie comme expédient. Est-ce le cas des boomers nippons?  En tout cas, profiter de la vie au maximum semble être leur mot d'ordre tout comme les boomers québécois, et tous ces gens possèdent des connaissances techniques et médicales qui sont susceptibles de leur faciliter la vie et en face desquels les médecins doivent s'adapter.

On comprendra, dans ces conditions, que ces gens désirent vivre à domicile le plus longtemps possible. Dans l'article consacré aux boomers québécois, on rappelle que c'est un choix logique si l'on veut que les hôpitaux reprennent finalement leur fonction première qui est de soigner les patients souffrant de maladies aiguës, laissant les maladies chroniques aux soins à domicile. L'article sur les boomers japonais insiste pour sa part sur cette tendance à adapter les maisons, afin de demeurer le plus autonome possible chez soi.

Que conclure?  L'article de Chantal Collard souligne le fait que les Japonais de 60 ans et plus ont baigné durant toute leur vie dans la musique occidentale et notamment le rock. Voilà donc des emprunts, parmi d'autres, des Japonais à notre culture. Pourquoi ne pourrions-nous pas, de notre côté, nous inspirer d'eux, notamment en matière de respect à l'égard des personnes âgées, compte tenu que « Dans ce pays qui, tous les 15 septembre depuis 1966, célèbre la Journée du respect des personnes âgées (Keirô no Hi), les aînés ont droit à plus de considération qu'en Occident »[3].

Car nos chers boomers québécois ont beau être plus revendicateurs que la génération précédente, est-ce que ce sera suffisant pour maintenir une dignité qui ne vient pas toujours avec les ans?  Le culte de la jeunesse qui domine notre société, bien que légitime, doit-il faire oublier pour autant le vieillissement inexorable avec tout ce que cela implique de sagesse et de valeur?

Pierre Tardif

[1] COLLARD, Nathalie, « Le modèle japonais », La Presse, 30 mai 2005,

cahier Actuel, pp. 1 et 2.

[2] GIRARD, Mario, « Carnets de santé des baby boomer », La Presse, 29 mai 2005,

cahier actuel, p. 3.

[3] COLLARD, Nathalie, Art.cit., p.1.

Pierre Tardif

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