POUR OU CONTRE L’ACCRÉDITATION TEMPORAIRE ?

E ncore une fois, l’actualité nous permet de porter un regard sur le monde des RPA. Cette fois, nous nous penchons sur l’accréditation temporaire.

En effet, le projet de loi 16 veut entre autres créer l’accréditation temporaire. Or une journaliste a révélé que

Pour obtenir une attestation temporaire, les résidences pour aînés n’auront qu’à respecter une liste restreinte d’exigences, comme prouver qu’elles sont solvables, que leur immeuble respecte le Code du bâtiment et que le propriétaire n’a pas de dossier criminel. (1)

Évidemment, s’il s’agit d’une attestation temporaire, donnée à des RPA qui sont en voie de certification, il est évident qu’elles ont respecté une liste restreinte d’exigences, sinon elles seraient déjà certifiées! Reste à savoir si ces exigences « restreintes » sont suffisantes pour leur permettre de fonctionner jusqu’à leur certification…

Ce qui nous intéresse ici, c’est de comparer les commentaires de diverses associations qui sont reliées de près au monde des RPA, précisément sur cette fameuse accréditation temporaire.

Suivre de près les RPA…

Commençons par l’Association québécoise d’établissements de santé et de services sociaux (AQESSS). Dans un communiqué datant du 13 septembre dernier, on apprend qu’elle est favorable à l’attestation temporaire, car, a déclaré La directrice générale, Mme Lise Denis,

L’attestation temporaire contribuera à éviter l’exploitation de résidences clandestines et permettra aux CSSS de diriger, de façon sécuritaire, ses usagers vers les résidences privées pour personnes âgées (2)

On voit ici un désir évident de contrôle de l’ensemble des RPA. Notez aussi l’utilisation du qualificatif « clandestines ». A quoi fait-on allusion? Fait-on référence à ces RPA qui agissaient effectivement en clandestinité et qui disparaissaient lorsqu’elles étaient découvertes ou parle-t-on plutôt des RPA qui ne sont pas encore certifiées?

Mais ajoutons qu’il sera possible au CSSS de bien guider les personnes âgées vers les « bonnes » résidences. Alors qu’en est-il du côté des aînés eux-mêmes? Comment voient-ils l’accréditation temporaire?

Protéger les aînés…

Pour l’Association québécoise des retraités des secteurs publics et parapublics (AQRP), l’accréditation temporaire est moins intéressante. Sa présidente, Mme Madeleine Michaud, a déclaré à une journaliste que l’attestation temporaire

C'est très minimaliste comme exigences. Les résidences non conformes vont afficher leur attestation temporaire dans leur entrée et ça va donner un faux sentiment de sécurité aux aînés (1)

Alors qui a raison? L’AQESSS déclare que l’accréditation temporaire permettra de mieux diriger les aînés en quête d’une RPA tandis que l’AQRP craint "une régularisation de la situation des résidences certifiées actuelles" (1).

Entre un point de vue qui vise à contrôler les RPA et un autre qui vise à protéger les aînés, il y a bien sûr la réalité des RPA. Que pense le Regroupement québécois des résidences pour aînés de la certification temporaire?

DU CÔTÉ DES RPA…

Le PDG du RQRA, Mme Dominique Viens déclare, dans un communiqué de presse daté du 12 mai, que

Nous accueillons positivement l'encadrement proposé quant au processus de certification temporaire et de conformité qui sera déployé par les Agences de santé et de services sociaux. Ceci contribuera à confirmer à la population nos standards de qualité. (3)

On pourrait se demander ce qu’est un standard de qualité dans le cas d’une RPA non encore certifiée. Il s’agit forcément d’une qualité non complète mais jugée suffisante en attendant la véritable certification…

Le point de vue des gestionnaires de RPA…

Comme on le voit, le sens donné au terme accréditation temporaire semble varier d’un point de vue à l’autre. Mais on sent malgré tout ce déchirement entre la nécessité d’avoir recours à des résidences de qualité (= certifiées) et celui de maintenir un nombre suffisant de lits, y compris dans des RPA non encore certifiées mais sur le point de l’être. Une gérontologue a d’ailleurs récemment bien expliqué le problème :

(…), quand on se fait critique face aux milieux d’hébergement, cela ne doit pas prêter le flanc à d’autres fermetures de lits, mais servir à revendiquer un rehaussement de la qualité des soins et une présence accrue de personnel (4) (p. 24)

Le terme "accréditation temporaire", avec ses variantes de sens, nous semble refléter la réalité actuelle du monde des RPA.

On peut évidemment penser que le terme d’accréditation temporaire n'a peut-être pas le même sens pour un gestionnaire dont la RPA est certifiée et pour celui dont la RPA est sur le point de l’être.

Encore une fois, les gestionnaires de RPA sont invités à donner leur avis…

REFERENCES

(1) Ariane Lacoursière, «Résidences privées pour aînés : des exigences minimalistes»
http://www.cyberpresse.ca/actualites/quebec-canada/sante/201108/29/01-4429941-residences-privees-pour-aines-des-exigences-minimalistes.php

(2) AQESSS, «Projet de loi no. 16, un cadre règlementaire plus serré qui respecte le choix des personnes âgées»,
http://www.newswire.ca/en/story/839841/projet-de-loi-no-16-un-cadre-reglementaire-plus-serre-qui-respecte-le-choix-des-personnes-agees

(3) RQRA, «Le RQRA appuie le projet de loi 16 sur l’encadrement des résidences privées pour personnes âgées»
http://www.cnw.ca/fr/story/808645/le-rqra-appuie-le-projet-de-loi-16-sur-l-encadrement-des-residences-privees-pour-personnes-agees

(4) Michèle Charpentier, « Domicile ou Hébergement? », Pluriâges, Vol.2, no.2 (Été 2011), pp. 23-24.
http://www.creges.ca/site/images/stories/Pluriages_ete_2011_FR.pdf

 
UNE ALTERNATIVE AUX CHSLD ?
Pierre Tardif

T

enter de trouver sinon des alternatives, du moins des compléments aux CHSLD à bout de souffle est dans l’air et ce depuis déjà quelques années. Nous avons trouvé le récit d’une expérience en ce sens qui pourrait intéresser les gestionnaires de RPA. (1)

En effet, dès 2003, un programme démarrait, sous le titre : "Pour un nouveau partenariat aux services des aînés : projets novateurs". Ces projets novateurs étaient appelés :" Nouvelles formules d’hébergement (NFH)". La question était de savoir si les NFH pouvaient offrir des services comparables à ceux desservis par les CHSLD.

Quelques années plus tard, de nombreux chercheurs ont tenté d’évaluer le projet dans le cadre d’une énorme étude: les résidents ont été évalués, les milieux analysés, les gestionnaires et intervenants questionnés. Dans un texte résumant la démarche NFH, et basé sur les conclusions de cette étude, l’une des chercheurs s’exprimait ainsi :

En définitive, ce programme de subventions a permis d’offrir, aux personnes âgées et à leur famille, l’accès à un choix plus diversifié de lieux d’habitation, mieux distribuées géographiquement et plus personnalisés, tout en ayant l’assurance qu’on y dispensait les services requis. Les NFH ont permis à des personnes de pouvoir demeurer dans leur communauté alors qu’en leur absence, ces personnes auraient été contraintes d’aller vivre dans un CHSLD, souvent plus éloigné de leur milieu de vie antérieur (p.4)

Ainsi, globalement, on note chez les NFH les qualités suivantes :

  • diversification des formules : on parle de 23 NFH;
  • les NFH sont situées dans des régions stratégiques correspondant au milieu de vie initial des résidents, donc pas de déracinement de ces derniers;
  • adéquation des services prodigués aux résidents : on parle de soins diversifiés dispensés par des professionnels compétents et attentionnés

Les résidents, en effet, bénéficiaient de chambres plus vastes qu’en CHSLD voire d’appartements. On note aussi le recours aux aidants qui avaient aussi leurs mots à dire.

Par contre, il semble que l’autonomie des résidents était généralement moins faible qu’en CHSLD, du fait d’une infrastructure moins rigide, ce qui faisait craindre un départ éventuel de ces derniers, advenant une perte d’autonomie car, généralement, les NFH n’avaient pas toutes les ressources pour continuer de les héberger…

On note également que les NFH avaient moins d’espaces communs que les CHSLD, et pas assez d’activités. On a aussi relevé que l’élément humain pouvait être développé. Enfin, une remarque qui, sans doute, deviendra un critère de plus dans les RPA : développer des services de réadaptation.

En somme l’expérience semble positive, mais l’auteur de l’étude conclut néanmoins que

(…), pour répondre aux nouvelles exigences des générations futures, d’autres innovations peuvent encore être souhaitées.

L’étude en question nous semble intéressante pour les gestionnaires de RPA dans la mesure où elle témoigne qu’un système impliquant une subvention dans le cadre de projets novateurs peut-être considéré, dans l’optique de développer diverses alternatives au CHSLD.

REFERENCES

(1) Nicole Dubuc, Évaluation de formules novatrices d’alternative à l’hébergement plus traditionnel : quelques résultats, Encrâge, Vol.11, No.1 (Printemps-été 2009), p.2 et 4.
http://www.csss-iugs.ca/cdrv/from_fckeditor/fichiers/Encrage%20Fr_Ete09_BR.pdf


APPARTEMENTS INTELLIGENTS PLUS SÉCURITAIRES
Pierre Tardif

O

n pense souvent que personnes âgées et technologie ne font pas bon ménage. Évidemment, cette impression s’avère de moins en moins fondées, étant donné que de plus en plus en plus de personnes âgées utilisent l’informatique…

Compte tenu de ce fait (et que les baby boomers finiront un jour par habiter des RPA), qu'en est-il d’une technologie qui serait développée dans le but de maintenir un certain degré d’autonomie des résidents dans leurs appartements et donc de maintenir la sécurité?

Toute la question est de savoir si les résidents seraient enclins à utiliser cette technologie. La question n’est pas superflue étant donné la nécessité qu’ont les gestionnaires de RPA d’offrir des logements les plus sécuritaires possible à leur résidents… et selon des normes de plus en plus serrées!

Voici un beau cas de projet de recherche impliquant l’université de Carleton et l’Hôpital Elisabeth Bruyère. Le nom du projet : "l’appartement intelligent tafeta". C’est un article de la SCHL qui nous a aiguillés sur ce projet :

Le programme de recherche TAFETA (…), conçoit des technologies conviviales permettant aux personnes âgées de vivre de façon autonome – ce que l’on désigne souvent par l’expression "vieillir chez soi" (p. 1)

Posons comme hypothèse que l’expression vieillir chez soi peut englober la vie dans certaines RPA (disons celles qui offrent des appartements). Car il y a gros à parier que les résultats de recherche pourraient être appliqués aux RPA d’autant que l’une des études en question a porté sur un centre d’hébergement communautaire abordable. Il s’agissait tout bonnement de tester un capteur magnétique qui avertit lorsque la porte du réfrigérateur est ouverte. On peut se référer à l’article cité plus bas pour une description de la procédure. Citons simplement la conclusion :

Un grand nombre d’aînés acceptent les technologies intelligentes, (…), qui peuvent les aider à vivre plus longtemps de façon autonome. Les participants ont reconnu le potentiel de cette technologie et indiqué une préférence pour les réfrigérateurs qui en sont équipés, même s’ils ne considéraient pas en avoir besoin à ce moment (p.3)

L’intérêt pour les chercheurs était aussi de vérifier en quoi cette technologie pouvait permettre de déceler certains problèmes chez les résidents, et pour ce faire, ils ont conçu

L’intégration de capteurs multiples dans le but de recueillir des ensembles de données plus robustes fournissant de l’information plus détaillées sur l’état de santé des résidents du centre d’hébergement communautaire (p.3).

Pensons par exemple aux pertes de mémoire de certains résidents qui oublient, par exemple, de fermer le poêle avant de quitter leur appartement, et avouons que ce genre de technologie, bien conçue, pourrait avoir du bon…

On sait que la certification exige des équipements de plus en plus sophistiqués dans les RPA. Le mouvement mènera-t-il vers une technologie encore plus développée rendant les RPA presque intelligente sous certains aspects, presque des outils de gestion complémentaires, pouvant aider à appréhender la perte d’autonomie d’un résident sans nécessairement en venir tout de suite à son déplacement en CHSLD?

REFERENCES

(1) SCHL, Des technologies intelligentes dans les habitations abordables pour personnes âgées, série socio-économie, septembre 2011
http://publications.msss.gouv.qc.ca/acrobat/f/documentation/2007/07-843-01.pdf